lundi 6 juillet 2020

Les putes voilées n'iront jamais au paradis ★★★★★♥ de Chahdortt Djavann

Comment ne pas être horripilée par une telle lecture, comment ne pas frémir, comment ne pas réagir, comment ne pas avoir envie de crier, d'exprimer sa colère ?
Quelle hypocrisie ! Quelle honte !
Des lois édictées pour rendre la vie des femmes impossibles, pour les condamner sous prétexte quelles sont des femmes ... 
Nausées, horripilations, écœurements...
Une lecture douloureuse, ô combien douloureuse.
Merci Chahdortt Djavann pour vos mots crus, vrais, touchants.
Hypocrisie de l'islam.
Quel bel hommage vous rendez à ces femmes belles, intelligentes, courageuses, des femmes qui ont connu de terribles destins, parce qu'elles étaient femmes, simplement femmes. 
Destins réels, palpables, injustes, effroyables, scandaleusement réels.
« D'outre-tombe. Je vais nommer ces prostituées, assassinées dans l'anonymat, leur donner la parole pour qu'elles nous racontent leur histoire, leur vie, leur passé, leurs sentiments, leurs douleurs, leurs doutes, leurs souffrances, leurs révoltes, leurs joies aussi. Certaines ont été assassinées sans que nul ne déclare leur disparition, sans que nul ne réclame leur corps ou pleure leur mort. [...]Ces femmes parleront avec une Liberté Totale, avec une Liberté Absolue. sans la moindre crainte, puisqu'elles n'ont rien à perdre, puisqu'elles ont déjà tout perdu: leur vie.Assassinées, pendues ou lapidées. Je vais exhumer ces femmes et les faire exister dans votre imaginaire pour le malheur des ayatollahs, et écrire noir sur blanc qu'elles n'étaient pas des souillures, que leurs vies n'étaient pas condamnables, et que LEUR SANG N’ÉTAIT PAS SANS VALEUR. Qu'elles méritaient la vie et non pas la mort. Qu'elles n'étaient pas la honte de la société. Qu'elles n'étaient pas des coupables, mais des victimes assassinées. Des femmes mal nées, malmenées, mal loties, des femmes fortes, des femmes fragiles,vulnérables, sans défense, des femmes meurtries. Des écorchées vives d'une société hypocrite, corrompue, et surtout criminelle jusque dans sa pudibonderie.Une société qui réprime, étouffe, pend, lapide, torture, assassine sous le voile. Je ne chercherai pas à les décrire ni comme des anges, ni comme des putains, ni comme des pures victimes. Mais comme des femmes. des Femmes Étonnantes. Et ce livre sera leur sanctuaire. Leur Mausolée. »
Putain de merde, comment est-ce possible ?
Comment accepter de tels actes, sanctionnant le fait de naître fille, comment peuvent-ils abuser de corps aussi jeunes, comment peuvent-ils prêcher et pêcher dans un même temps ? Aucune gloire. Rien. Les mollahs, les ayatollahs ... comment pouvez-vous prêcher, alors que vous êtes pécheurs vous-mêmes ?  
Engagée une nouvelle fois dans mes propos ; je ne peux que me sentir meurtrie par ce que j'ai lu, par ces histoires de femmes qui n'avaient rien à se reprocher, qui aspiraient à vivre, à survivre, à ressentir, à vibrer, à aimer.
Un livre dur, un livre éblouissant, un livre qui mobilise.
Le paradis leur est dû. La moindre des choses...
« Je prends mon pied avec vos pères, vos frères, et vos maris. Ça vous choque ? Eh bien, c'est votre problème, bande d'hypocrites ! je ne vends pas mon corps. Je couche en échange d'argent. C'est un métier honnête et les gens en ont pour le fric. [...]C'est drôle que, dans ce monde de putes où la corruption, le crime et la prostitution de tout genre gangrènent les sociétés, on s'en prenne à nous, ça en dit long sur la régression de notre époque. Ce n'est pas pour rien que , dès que les extrémistes islamistes s'emparent du pouvoir, ils s'en prennent tout de suite au plaisir en général, et au plaisir sexuel en particulier. Comme les mollahs ici ou les Frères Musulmans en Egypte...Ils ne supportent pas l'idée que leur mère ait écarté les jambes pour les fabriquer.Remarquez, elles auraient mieux fait de s'abstenir.  »

« - Procédure de quoi ? Ça fait des heures que j'attends ici, quelqu'un a volé ma fille de huit ans et vous me demandez la profession de mon mari...
- Vous n'êtes pas le tuteur de votre fille, c'est à son père de venir déclarer sa disparition.
- Vous voulez dire que ma fille que j'ai portée dans mon ventre n'est pas ma fille ?
- Ventre ou pas, vous n'avez aucune autorité sur les enfants de votre mari. Ne me faites pas répéter des évidences... »

« Ici, sur cette terre sacrée de l'islam, souillée pourtant par le péché, Shéhérazade et ses mille et une nuits de fables se muent en une seule et mille et une fornications. »

« La nuit, la souillure humide, la souillure d'entrejambes plane sur la sainte ville et l'odeur des queues éjaculant et des cons accueillants remplit dès l'aube les narines des croyants pratiquants. »

« L'assassinat est condamnable selon la charia, tandis que l'élimination de Fessad [mot persan d'origine arabe, signifie la corruption, la perversion, la débauche, et ici la prostitution] est le devoir de chaque musulman. »

« La vie humaine est tarifée par les mollahs. Prix fixe. Non négociable. Celle d'une bonne musulmane vaut la moitié de celle d'un bon musulman. »
« [...] en éliminant les "ennemis de l'islam" dont le "sang est sans valeur", les "bons musulmans" n'accomplissent que leur devoir. »

« La sécurité des femmes n'a jamais été aussi en péril que depuis que les dogmes islamistes font office de loi dans ce pays. »

« L'humiliation féminine est devenue générale et nationale dans notre pays, puisque ce sont les lois elles-mêmes qui écrasent les femmes, leur dérobent les droits les plus élémentaires et les définissent comme des sous-hommes. On est bonne à être mariée, donc forniquée, dès neuf ans, pendue ou lapidée dès douze ans, mais à vingt ans on ne dispose pas de son cul. Femme, vous ne disposez jamais de votre corps ni de votre vie dans ce pays. La loi vous l'interdit. »

« Mais c'est quoi, la vertu, exactement ? C'est souffrir tout son saoul, c'est vivre dans la frustration, dans la privation, dans l'hypocrisie, dans la méchanceté, dans l'avidité et l'exclusion ? La sexualité des femmes est taboue dans toutes les religions et dans toutes les cultures. »

« Je pense qu'il faudrait nous nommer les "praticiens du sexe" et favoriser l'accès des femmes aux services sexuels. Ça ferait beaucoup de bien à l'humanité»

Quatrième de couverture

Ce roman vrai, puissant à couper le souffle, fait alterner le destin parallèle de deux gamines extraordinairement belles, séparées à l’âge de douze ans, et les témoignages d’outre-tombe de prostituées assassinées, pendues, lapidées en Iran.
Leurs voix authentiques, parfois crues et teintées d’humour noir, surprennent, choquent, bousculent préjugés et émotions, bouleversent. Ces femmes sont si vivantes qu’elles resteront à jamais dans notre mémoire. 
À travers ce voyage au bout de l’enfer des mollahs, on comprend le non-dit de la folie islamiste : la haine de la chair, du corps féminin et du plaisir. L’obsession mâle de la sexualité et la tartufferie de ceux qui célèbrent la mort en criant « Allah Akbar ! » pour mieux lui imputer leurs crimes.
Ici, la frontière entre la réalité et la fiction est aussi fine qu’un cheveu de femme.

Éditions Grasset, avril 2016
206 pages

1 commentaire:

  1. Merci Sandrine pour cette chronique. Cela fait un petit bout de temps que ce livre m'intrigue, vous me confirmez dans mon envie de le découvrir ! On ne peut qu'admirer le courage de son auteur.
    Garance

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