mardi 30 mai 2017

Amours ★★★★★ de Léonor de Recondo


Éditions Sabine Wespieser, janvier 2015
276 pages
Prix RTL-Lire 2015
Prix des Libraires 2015
Prix des Lecteurs du Grenier (Dinan)
Prix des étudiants francophones - 2016

Quatrième de couverture


Nous sommes en 1908. Léonor de Récondo choisit le huis clos d’une maison bourgeoise, dans un bourg cossu du Cher, pour laisser s’épanouir le sentiment amoureux le plus pur – et le plus inattendu. Victoire est mariée depuis cinq ans avec Anselme de Boisvaillant. Rien ne destinait cette jeune fille de son temps, précipitée dans un mariage arrangé avec un notaire, à prendre en mains sa destinée. Sa détermination se montre pourtant sans faille lorsque la petite bonne de dix-sept ans, Céleste, tombe enceinte : cet enfant sera celui du couple, l’héritier Boisvaillant tant espéré.
Comme elle l’a déjà fait dans le passé, la maison aux murs épais s’apprête à enfouir le secret de famille. Mais Victoire n’a pas la fibre maternelle, et le nourrisson dépérit dans le couffin glissé sous le piano dont elle martèle inlassablement les touches.
Céleste, mue par son instinct, décide de porter secours à l’enfant à qui elle a donné le jour. Quand une nuit Victoire s’éveille seule, ses pas la conduisent vers la chambre sous les combles…
Les barrières sociales et les convenances explosent alors, laissant la place à la ferveur d’un sentiment qui balayera tout.

Mon avis ★★★★★


Très belle découverte, celle d'une plume belle, sensuelle et délicate, d'une justesse indéniable. Les descriptions suspendent le temps, nous enivrent . Ce récit d'une fluidité remarquable nous transporte au début du siècle dernier, dans une société où la bienséance est de mise, où l'éducation des jeunes filles est régie par des règles bien proprettes et rigides, où la maternité est un jalon dans la vie d'une femme, où les niveaux sociaux conditionnent une vie... «Le ton de sa voix est posé, presque calme. Elle réalise soudain que la solitude, dans laquelle elle est née, l'oblige à toujours acquiescer. Si elle avait eu le choix - mais ce mot n'existe ni dans sa condition, ni dans son vocabulaire-, elle aurait dit : «non». Elle l'aurait même hurlé.»,  où l'amour ne se conjugue pas au pluriel et contraint ainsi, parfois, au sacrifice. Une société qui, à bien des égards, n'est pas très éloignée de la nôtre. 

J'ai aimé ces deux femmes, Victoire et Céleste, la puissance et la pureté de leurs sentiments si bien décrits par Léonor de Récondo, j'ai aimé leurs gestes, j'ai aimé, quand l'amour naissant, Victoire re-découvre, accepte et aime son propre corps ... 
Un petit bijou  à savourer ... 

Hâte de me plonger dans Pietra Viva qui m'attend depuis un petit moment déjà...
«La mère observe cette enfant qui lui revient, elle note un changement à peine perceptible dans la démarche. Et pourtant, sa pensée s'arrête là. Elle qui a porté la vie de si nombreuses fois pourrait percer le mystère, mais elle ne le fait pas.Céleste ira aux champs aider son père. Elle transpirera, exténuée par le labeur et la chaleur, elle vomira parfois au bord du chemin. Elle ira dans sa clairière s'asseoir sur une souche en se demandant pourquoi elle est si émue à la vue des fougères vert tendre, pourquoi elle se sent à l'affût de la vie, les larmes toujours au bord des yeux. Instants de bonheur fugaces où Céleste, à son insu, entre dans la danse de la nature, lui donnant corps.
Il sait aussi qu'on peut s'aveugler à trop remuer la poussière, alors il la laisse tomber.
Sous les tuiles de la maison bourgeoise, quatre personnes sont couchées, seul l'enfant dort. Les autres gardent les yeux grand ouverts. Chacun dans sa pièce, chacun dans sa solitude profonde, hanté par des rêves, des désirs, des espoirs qui ne se rencontrent pas, qui se cognent aux murs tapissés, aux taffetas noués d'embrasses - métrages de tissu qui absorbent les soupirs pour n'en restituer qu'un écho ouaté.
Il la serre une fois encore, puis remet sa casquette, et repart rapidement. De la vie, on ne garde que quelques étreintes fugaces et la lumière d'un paysage.»

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