mercredi 16 janvier 2019

Les belles ambitieuses ★★★★★ de Stéphane Hoffmann

« Marraine travaille à l'ancienne, c'est à dire qu'elle couche, qu'on le lui pardonne. Elle a ceci en commun avec les journalistes politiques : elle aime les ministres. Attention ! Les ministres en exercice. Qui sort du gouvernement sort aussitôt de son lit : Marraine a un rang à tenir. »
Une comédie, drôle, extrêmement intelligente, cinglante et empreinte d'une douce mélancolie. 
On observe 20 ans de vie politique, d'ambitions, de rancoeurs, au travers de ce portrait plutôt grinçant de la bourgeoisie versaillaise.
Amblard Blamont-Chauvry, jeune énarque, un Lucchini calme, se pose pour prendre du recul. Il est à contre pied de la tendance actuelle du toujours plus, toujours plus haut, toujours au sommet, toujours le premier. Autour de lui vont graviter de "charmantes et mondaines ambitieuses" aux dents bien trop aiguisées pour ne pas flirter avec le plancher.
Une lecture qui sonne juste, qui résonne avec l'actualité et qui s'avère être un réel plaisir de lecture ! Une satire de notre société actuelle, servie par une plume vive et mordante, à ne pas bouder, assurément !
Merci Yves Grannonio de la Librairie du Château de Brie-Comte-Robert. Un conseil lecture payant, plaisant, enivrant ... une nouvelle fois. Comme toujours, même. Même pas peur ;-)
Aucun prix pour cet opus ?
 « Il est bien né Amblard, Marraine est Versaillaise. Il pourrait sans effort aller grenouiller dans les hautes sphères, oui mais voilà, il est quelque peu feignant et aime beaucoup les femmes. »

« Pour ma fortune et mon malheur, j'ai eu l'intelligence à la mode de ces années-là. Une agilité permettant de se glisser au-dessus des autres et d'y rester.À vingt-cinq ans, je suis énarque et je suis polytechnicien. Ce qui ne m'empêche pas d'être un con.
Sans doute ai-je vu trop de comédies américaines mais, grâce à elles au moins nous savons que l'amour et la haine se chauffent à la même forgé.
Au cœur net, il préfère le flou du cœur léger.
Si on n’y prend pas garde, on se retrouve marié quand on prend juste plaisir à être ensemble. Mal assorti, le mariage est un crime parfait: deux morts. Le criminel – la société – n’est jamais punie. Il arrive même que ce double meurtre lui profite.
Nous avons trouvé la vérité de notre relation : l'amour physique. On me dit que j'ai une vie de chatte de gouttière. C'est curieux comme on condamne ceux qui font du bien. Je suis heureuse avec toi, tu es heureux avec moi. Laissons la société à Isabelle Surgères qui, elle, ne sera jamais heureuse parce que ce qu'elle n'a pas encore est plus important que ce qu'elle a.
Tout ce qu'on veut, on l'a : c'est notre punition. L'ambition est punie parce qu'on ne veut jamais assez haut.
Ne pas dire un mot de toute une journée, ne pas avoir de journal ne pas entendre la radio, ne pas écouter de commérages, s'abandonner absolument complètement, à la paresse, être absolument, complètement, indifférent au sort du monde, c'est la plus belle médecine qu'on puisse d'administrer. Henri Miller, Le Colosse de Maroussi
Les livres, eux, vous enrichissent de dix mille existences.
Nous sommes les enfants de nos jardins. Nous les dessin on, ils nous façonnent. Nous croyons les entretenir, ils nous tiennent. Trop vastes quand on veut les tondre, trop petits lorsqu'on veut s'isoler, ils nous apprennent la lenteur, la modestie, la ténacité, l'audace et l'imagination. Tout ce qui manque à la fois aux énarques et aux polytechniciens.
Nixon vient d'être réélu. Isabelle se passionne aussi pour ça. Je suis plutôt du genre à penser qu'on a rien vu de neuf depuis Solon ou Ptomélée IV (et encore !), alors que le dernier cocktail du barman de l'ambassade vaut seul qu'on en parle. Je suis léger, seule manière de surnager dans ce naufrage.Dans la diplomatie, comme on le sait, il ne suffit pas d'être bête, il faut encore être poli.
... un homme qu'on soupçonne vit une double souffrance. D'abord d'être soupçonné, ensuite de se priver des plaisirs pour lesquels on le suspecte. Quitte à être torturé, autant se faire consoler.
Plus Delamare est cynique, mieux ses ministres l’apprécient: il est tellement drôle. Pour se faire respecter, il propose projets déments et coûteux , tout en multipliant les propositions de réglementations inutiles: tout est accepté.
Pour se faire craindre de ses subordonnés, il sanctionne les bons et félicite les mauvais. Pour s’en faire aimer, il donne des cocktails et des jours de congés. Et l’étoile Delamare monte au ciel politique.  
 »

Quatrième de couverture

« Traîner au lit avec une dame aimable est une sagesse : on n’y a besoin de rien ni de personne d’autre. C’est aussi une plénitude, c’est-à-dire un paradis. »

Paris, années 70.
La comtesse de Florensac veut avoir le salon le plus influent de Paris. 
La jeune Isabelle Surgères veut changer la vie.
La douce Coquelicot veut faire plaisir à ceux qu’elle aime.
Ce sont les belles ambitieuses.
Elles s’activent autour d’Amblard Blamont-Chauvry qui, bien que polytechnicien, énarque, et promis à une brillante carrière, a décidé de s’adonner à la paresse, l’oisiveté, la luxure, la gourmandise et autres plaisirs.
Que faire de sa vie ? Comment s’épanouir ? Doit-on être utile ? Peut-on être libre ? Faut-il être ambitieux ?
À ces questions, chacun des personnages, entre Paris, Versailles et les États-Unis, à la ville comme à la campagne, répond à sa façon, et de manière parfois surprenante.
On retrouve l’élégance et l’humour mélancolique de Stéphane Hoffmann, prix Roger Nimier pour Château Bougon, dans ce roman éblouissant de finesse.

Éditions Albin Michel, août 2018
265 pages

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