mardi 11 août 2020

Le Maître des poupées et autres histoires terrifiantes ★★★★☆ de Joyce Carol Oates

Délicieusement macabre ! 
C'est terrifiant, noir à souhait. 
La violence et ses conséquences décortiquées par la plume de Joyce Carol Oates, c'est éprouvant, certes, terrifiant aussi, mais ... quel talent ! 
Un recueil de six nouvelles absolument flippant, qui convie le macabre dans des vies ordinaires, et montre à quel point un être humain est capable de sombrer dans la violence, de basculer dans l'univers de l'horreur. Elle nous plonge dans la psychologie des ces personnages (un jeune garçon qui affectionne particulièrement les poupées, une jeune fille délaissée par sa mère, un soldat qui semble être, somme toute, tout à fait normal, un homme d'affaires avide de pouvoir, une jeune adolescente qui accepte de garder la maison de sa professeure en son absence...) ; un "grain de sable" dans les rouages de leur vie les fait basculer dans le pire.
C'est insoutenable parce que criant de banalité ...
« Toute ta vie, tu brûles de revenir à ce qui était. Tu brûles de revenir vers ceux que tu as perdus. Pour y parvenir, tu feras des choses terribles, que personne d’autre ne peut comprendre. » 
Âme sensible s'abstenir !

« Toute ta vie, tu brûles de revenir à ce qui était. Tu brûles de revenir vers ceux que tu as perdus. Pour y parvenir, tu feras des choses terribles, que personne d'autre ne peut comprendre. »  (Le Maître des poupées)  

« C'est au moment où il ne peut pas se rendre compte - qu'il est encore en vie. Il rit et son expression rayonne de bonheur parce qu'il est vivant et qu'il ne peut imaginer une seconde où il ne sera pas-vivant parce que (à ce qu'on dit) aucun animal ne peut comprendre sa propre mort. » (Accident d'arme à feu)

« ... vous survivront. Tous autant que vous êtes.
Vous autres créatures stupides qui tiennent debout et qui ne font que vouloir, vouloir, vouloir. » (Équatorial)

« Des sous-espèces de tortues s'étaient déjà complètement volatilisées pour se métamorphoser en peignes victoriens et en dos de miroirs. C'était une chose terrible que cette vie qui dévorait la vie. Mais la disparition, l'extinction - voilà qui semblait encore plus terrible. » (Équatorial)

« Dans la vie, il y a les prédateurs et les proies. Un prédateur peut avoir besoin d'un appât, et une proie peut confondre l'appât avec sa pitance. » (Mystery, INC.) 

« Si un étranger pénètre dans votre territoire en manifestant des intentions sinistres, ou même sans en manifester, il vaut probablement mieux le tuer plutôt qu'essayer de le comprendre, ce qui pourrait vous conduire à commettre une erreur fatale. Dans le passé lointain, avant que Dieu ne soit Amour, ce genre d'erreurs pouvait mener à l'extinction d'une espèce entière ... si bien que l'espèce qui anticipe, l'Homo sapiens, préfère se tromper par excès de prudence, plutôt que l'inverse. » (Mystery, INC.) 

Quatrième de couverture

Un jeune garçon se prend d’affection pour la poupée désormais orpheline de sa cousine, victime d’une leucémie, et commence bientôt une étrange collection – celle de poupées en tout genre dénichées dans le voisinage, comme abandonnées par leurs propriétaires. Mais la frontière est parfois ténue entre collection et obsession, et les poupées semblent être, aux yeux du garçon, bien plus que de simples jouets d’enfants…

Les cinq autres nouvelles qui composent ce recueil font tout autant le récit inquiétant de vies ordinaires bouleversées par l’irruption du macabre : une adolescente, délaissée par sa mère, trouve du réconfort auprès d’une autre famille, jusqu’à recevoir beaucoup trop d’amour ; un homme d’affaires est prêt au pire pour acquérir une mystérieuse librairie de livres anciens… Ou encore une femme qui comprend avec effroi les terribles desseins de son mari à son encontre.

Joyce Carol Oates initie une plongée dans les psychés troublées de personnages en qui le lecteur reconnaît un voisin, une camarade de classe ou son libraire de quartier, réveillant avec talent la fascination pour l’horreur qui gît en chacun de nous, au risque d’en perdre le sommeil.

« Chez Oates, l'horreur n'a jamais rien de surnaturel. Notre monde est déjà bien assez terrifiant. »  
New York Times Book Review

Éditions Philippe Rey, septembre 2019
330 pages
Traduit de l'anglais (Etats-Unis)  par Christine Auché

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